Bonjour à tous, je vous emmène aujourd’hui faire un tour de garde devant l’impressionnante cité de Toroporos. Là où l’opulence des maîtres des lieux tranche nettement avec la pauvreté des bas quartiers. Entre les deux, la classe moyenne se débat pour survivre dignement. En cette nuit glaciale, personne n’ose s’aventurer dehors. Le couvre-feu est déclaré depuis longtemps pour contenir la population et traquer un mystérieux groupuscule d’opposition qui profiterait de la nuit tombée pour conspirer.
C’était un de ces soirs où la pleine lune peine à percer les épais nuages qui passent sans cesse devant elle. Les ombres jouaient ainsi avec les nerfs des gardes simulant, de temps à autre, l’apparition d’un dragon dans le ciel.
Ça aurait été une nuit parfaite pour une attaque par les airs. Pourtant le danger viendrait d’ailleurs. Il venait lentement, tapi dans l’ombre, attendant le bon moment pour se mouvoir suivant l’ombre d’un nuage menaçant ou les mouvements des gardes qui redoutaient l’engourdissement en restant dans une position fixe.
Les gardes les plus expérimentés pouvaient le sentir se danger, mais ils ne pouvaient pas le voir. La tension montait encore d’un cran. À cela s’ajoutait la fatigue d’un long tour de garde devant la forteresse du maître des lieux. Heureusement, la relève arriverait bientôt, il serait alors temps de prendre un repos bien mérité et transmettre l’angoisse et la crainte à l’équipe suivante comme une patate chaude. Pourtant, il est bien difficile de se débarrasser de ce genre d’impressions et de sentiments. Ça colle comme de la mélasse et vous prend aux tripes pendant longtemps. Même après avoir cédé son tour de garde il est bien difficile de s’en soustraire avant de trouver refuge dans un sommeil salvateur, s’il le veut bien et n’est pas lui-même hanté par la torpeur.
Oui, la vie d’un garde n’est pas de tout repos, mais après tout, c’est dans toute la cité de Toroporos que la crainte règne depuis plusieurs lunes.
Soudain, un mouvement sur la gauche attira le regard d’un garde qui fit signe à son camarade qu’il allait vérifier de quoi il s’agissait. Il lui semblait bien avoir aperçu une ombre se glisser dans l’angle du bâtiment. Le garde approcha lentement du coin du bâtiment. Effleurant la pierre millénaire qui dressait depuis longtemps la muraille du poste de garde. Il sentait son odeur humide et salée qui trahissait l’arrivée imminente d’un orage futur. Il fit irruption dans le renfoncement, épée dressée droit devant lui pour pouvoir parer une éventuelle attaque. Il sursauta pourtant en voyant un gros chatrax, un gros chat a deux queues, fuir effrayé alors qu’il pistait certainement un rat attiré par les stocks de provisions entassés juste derrière le mur. Rassuré après que la surprise soit, passée, le garde regagna son poste. Il fit signe à son camarade qu’il s’agissait d’une fausse alerte. Devant l’absence de réponse de celui-ci, il réitéra son signe de main. Les gardes de la cité possédaient leur propre système de communication à travers différents signes de main, son acolyte lui répondit cette fois d’un simple signe qui n’était absolument pas répertorié. Comment osait-il lui faire un tel affront ? Le garde s’approcha alors de son camarade négligeant pour une mise au point verbale. Arrivé à moins de trois mètres, il allait réprimander son collègue lorsque ce dernier s’écroula lourdement sur le sol dévoilant une ombre noire jusqu’alors dissimulé derrière lui. Le garde cria immédiatement l’alerte, mais le seul son qui sortit de sa bouche était celui d’un léger ruissellement de sang. L’ombre noire s’était approchée à une vitesse fulgurante et l’avait transpercé de son épée. Le garde eut pour dernière vision le regard de son meurtrier. Un regard froid, bien que rougeoyant. Une étrange sensation de chaleur s’empara de lui, il avait mal, mais pas autant qu’il aurait pu l’imaginer dans une telle situation. Puis plus rien, il ne sentait plus rien, pas même la chute de son corps sur le pavé. Rien, sa vie venait de s’achever sans qu’il eût pu la défendre.
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